« My name is Luka, I live in the second floor »… J’écoutais récemment cette chanson « Luka », chanson pop de Suzanne Vega des années 80.
Saviez-vous que c’est l’une des premières chansons à traiter du sujet de la maltraitance des enfants et de la violence domestique ?
Au même moment, je terminais l’ouvrage de Susan Forward « parents toxiques ».
Je trouve intéressant de partager quelques éléments clés que l’on peut oublier et qui sont essentiels sur les droits des enfants et le devoir des parents. Je rappellerai également l’importance de faire tomber les parents de leur piédestal lorsque nous devenons adulte.
En effet, les enfants grandissent avec des droits fondamentaux dont le droit :
– d’être nourris, vêtus, abrités et protégés. (physique matériel)
– d’être nourris sur le plan émotionnel,
– d’être respectés dans leurs sentiments et d’être traités de façon à pouvoir forger le sens de leur propre valeur.
– d’être guidés par les limitations convenant à leur conduite, de faire des erreurs
– d’être formés à la discipline (terme signifiant transmettre des connaissances et des habiletés, éduquer) sans être brutalisés physiquement ou émotionnellement.
Quant aux parents, ils ont des devoirs envers leurs enfants et notamment :
– pourvoir aux besoins matériels de leurs enfants
– protéger leurs enfants de tout dommage physique
– répondre aux besoins de leurs enfants en matière d’amour et d’attention
– protéger leurs enfants de tout dommage émotionnel
Au fur et à mesure que les enfants grandissent, des parents affectueux alimenteront leur maturité en leur donnant certaines responsabilités, certaines tâches à la maison mais jamais au détriment de leur enfance.
Tous les parents sont déficients… et oui, nous ne sommes pas des dieux ! Nous avons été enfants et nous devenons parents avec notre propre histoire. Il est donc impossible d’être des parents parfaits. Nous sommes faillibles mais nous avons la possibilité de nous remettre en question en tant qu’être humain. Winicott, célèbre pédiatre et psychanalyste anglais du début du vingtième siècle, parlait de « good enough mother », signifiant « mère ordinaire normalement dévouée » ou peut-être encore plus justement « mère tout juste acceptable » .
Cependant certains d’entre nous grandissent avec ce que Susan Forward appelle le mythe du « parent parfait » et des parents toxiques. L’image idéalisée du parent irréprochable crée un environnement contraint pour les enfants, qui peuvent ressentir une pression à dissimuler leurs ressentis ou à ne pas faire part de leurs besoins. Cette vision peut empêcher l’enfant de se forger une individualité solide et de devenir plus autonome.
Il s’agit bien d’un mythe que l’on peut porter en soi et de la force de cette dénégation. Or, cette force déguise la réalité pour minimiser ou même nier l’impact de certaines expériences pénibles. Elle peut même faire oublier à certains d’entre nous ce que nos parents nous ont fait, ce qui nous permet de les maintenir sur leur piédestal.
Pour beaucoup d’adultes élevés par des parents toxiques, le refus est un processus simple, inconscient qui repousse hors du champ de la conscience, certains événements et certains sentiments, en prétendant que ces événements n’ont jamais eu lieu.
Le recours à la rationalisation, ou appelé également en psychologie « mécanisme de défense », nous pousse à utiliser de « bonnes raisons » pour expliquer et éliminer les faits douloureux et gênants…. Mécanisme permettant de rendre acceptable l’inacceptable.
Il arrive également que ces ressentiments à l’égard de parents toxiques se déplacent de la personne concernée vers une cible plus facile.
Et la mort n’interrompt pas la déification des parents toxiques. Il arrive même qu’elle l’amplifie. La mort confère une sorte de sainteté, même au pire des criminels.
La déification des parents morts est presque automatique.
« Les parents dieux établissent des règles, rendent des jugements et font du mal. Lorsque vous déifiez vos parents, vivants ou morts, vous acceptez de vivre selon leur conception de la réalité. Vous acceptez que les sentiments douloureux fassent partie de votre vie, peut être même en imaginant, par le biais de la rationalisation, qu’ils sont bons pour vous. Il est temps d’arrêter. Lorsque vous faites redescendre vos parents toxiques sur terre, lorsque vous trouvez le courage de porter sur eux un regard réaliste, vous devenez capable de rééquilibrer vos relations mutuelles. » Susan Forward
Certains parents sont voleurs d’enfance. Cela arrive souvent lorsque des enfants ploient sous des responsabilités qui revient de droit aux parents. En étant forcé à grandir trop vite et trop tôt, les enfants sont privés de leur enfance, avec rarement l’occasion de jouer ou d’être insouciant. Ces enfants vont devenir des adultes qui vont s’occuper des autres mais pas d’eux d’où leur difficulté à reconnaître leur propre besoin.
Parfois, ils doivent s’occuper de leur frère et sœur ou voir d’un problème émotionnel de l’un de leurs parents.
Ainsi, les enfants forcés à changer de rôle sur le plan émotionnel avec leurs parents ont ce comportement typique : ils conservent dans leur vie d’adulte un énorme sentiment de culpabilité et un sens des responsabilités excessifs. En tant qu’adultes, ils se trouvent souvent pris au piège d’un cercle vicieux qui les fait accepter des responsabilités pour tout, échouer inévitablement, se sentir coupables et incapables, et réagir en redoublant d’efforts.
cycle épuisant, accablant, qui ne cesse d’aggraver ce sentiment d’échec.
Dans le film de « Springsteen : Deliver me from nowhere », la source de la dépression de cet artiste est mis en avant. Bruce Springsteen a vécu une enfance dans un environnement toxique : son père, diagnostiqué tardivement bipolaire et schizophrène, souvent alcoolisé et sa mère, en proie à la violence de son mari et qui demandait à son fils de la protéger elle et son mari. « Tout ce que je sais, c’est qu’en vieillissant, le poids de tout notre bagage non réglé devient lourd, de plus en plus lourd. À un moment, les défenses que j’avais construites pour supporter le stress de mon enfance, pour sauver ce qu’il restait de moi, se sont mises à outrepasser leur utilité et je me suis mis à abuser de leurs pouvoirs. Je me suis reposé sur elles pour m’isoler à tort, pour enfermer mon aliénation, me coupant de la vie, contrôlant les autres, contenant mes émotions jusqu’à un degré dommageable. À ce moment-là, l’addition frappait à la porte et j’allais devoir en payer le prix en larmes. » La thérapie l’a aidé à se sortir de la dépression : « Cela a été un changement total de vie. […] Lorsque je suis entré dans le bureau du thérapeute, j’ai tout déballé. Je n’avais pas de maison, je n’avais pas de partenaire, je n’avais pas de vie au-delà de mon travail, et ce sont des choses que je voulais. »
Des parents aimants n’agressent pas avec acharnement la dignité et l’amour propre de leur enfant.
L’idée de la thérapie n’est pas de détacher les patients de leurs parents ou de les renier. Mais la guérison de la dépression dépend sans doute en grande partie de la capacité à renoncer à l’idée que les parents ne sont pas parfaits et qu’ils ont eu un comportement cruel à leur égard.
Sources : « Parents toxiques : comment échapper à leur emprise » Susan Forward